Sunday, May 27, 2007
LES SIDDHIS (pouvoirs surnaturels)
« Les gens ne voient que leur propre corps et ils veulent des siddhis (pouvoirs occultes). Quand il s’agit de la réalisation du Soi, comment des pouvoirs pourraient-ils s’y trouver, ou se situer au-delà ? Les gens qui ont envie de siddhis ne se contentent pas de ce qu’ils conçoivent comme le jnâna ; ils veulent y ajouter des siddhis. Ils risquent donc de négliger le bonheur suprême du jnâna et de chercher des siddhis. Ils s’embourbent ainsi dans les voies latérales au lieu de s’engager sur la voie royale, et ils ont toutes les chances de s’égarer. Pour les mettre sur la bonne piste et pour les maintenir sur la voie royale à l’exclusion des autres, on leur dit que les siddhis accompagnent le jnâna. En vérité le jnâna comprend tout, et un jnânin ne gaspillera pas une seule pensée pour les siddhis. Que les gens cherchent d’abord le jnâna, et qu’ils cherchent les siddhis ensuite s’ils en ont envie. »
(Enseignement oral de Ramana Maharshi. Ce grand saint ne cessa de dénoncer les dangers de l’attachement aux pouvoirs surnaturels.)
1) Jnâna, c’est la sagesse spirituelle et l’éveil à l’ultime Réalité.
2) Atman ou le Soi.
Pierre Feuga après avoir étudié à la fois le Vedanta et le bouddhisme, ne différencie pas vraiment l’Atman de la nature de Bouddha :
« Je lisais beaucoup mais je n’avais pas – et je n’ai toujours pas – le tempérament rongeur d’un universitaire. Je ne cherchais donc pas à établir historiquement l’influence du bouddhisme sur le Vedanta ou du Vedanta sur le bouddhisme. N’étant pas dogmatique ni adepte de la pensée binaire, je ne me préoccupais pas non plus de savoir qui avait tort et qui avait raison, de la Mère ou du fils… je veux dire de l’hindouisme ou du bouddhisme, car il m’a toujours semblé qu’il s’agissait bien là d’une querelle de famille (les pires !), une famille éclatée en somme, non pas pour une banale histoire d’Eveil sous un figuier (ce n’était pas la première ni la dernière) mais peut-être pour une ténébreuse histoire de castes. Le bouddhisme est issu du brahmanisme comme le christianisme est issu du judaïsme (là, c’est plutôt un père qu’une mère), mais on ne se délivre pas si facilement de ses origines, il y a toujours l’empreinte génétique, le remords, la nostalgie et le besoin de se justifier qui poursuivent l’enfant prodigue… Et ce Bouddha Shâkyamuni, qui ne se voulait que le thérapeute de la souffrance, qui méprisait toute métaphysique, s’est retrouvé de fait à la source d’un foisonnement invraisemblable de spéculations, de théories, de débats, d’exégèses qui pourrait en remontrer, par la subtilité mais aussi la finasserie chicanière, la mauvaise foi et le coupage maniaque de cheveux en seize, à la plus détestable scolastique hindoue. J’aurais donc pu décréter, me débarrassant du problème, que tout cela, en fin de compte, n’était qu’indien, panindien, indianité, indianitude, et qu’il s’agissait de la même rengaine indéfiniment ressassée : moksha ou nirvana, plénitude ou vacuité, atman ou nature du Bouddha… tathata (écoutez crépiter ces trois syllabes sur le toit de votre parapluie)… Oui, la même chose exprimée avec des mots différents par des gens qui prenaient systématiquement le contre-pied les uns des autres, par jeu, par plaisir, par dépit, pour entretenir le Jeu cosmique, pour égayer le samsara, allez savoir…
Trop facile ! Amalgame, syncrétisme, paresse de l’esprit ! Je m’en avisais aussitôt que j’avais la tentation d’y céder et je retournais donc à mes comparaisons laborieuses. Mais comment discriminer entre les différences réelles, les fausses différences, les concordances, les fausses ressemblances ? Plus je m’efforçais de confronter les deux sagesses, plus elles échappaient à mes prises, me laissant retomber, mais piteusement, sans élégance, dans une sorte de tétralemme marécageux. Bouddhisme et Vedanta ? « Ni semblables ni dissemblables, ni semblables et dissemblables à la fois, ni non-semblables ni non-dissemblables. » A vous maintenant, vieux jeunes gens du vingt et unième siècle, de serpenter dans cette lumineuse confusion. »