Par Hélène Crié-Wiesner
Un édifiant film d'animation diffusé sur le Web attire l'attention sur une possible réforme de la réglementation américaine.
Aux Etats-Unis, une femme utilise en moyenne douze cosmétiques par jour, un homme environ six. Chacun de ces produits contient une douzaine ou plus de composés chimiques, souvent toxiques. Après des années de campagne menée par des consommateurs, un projet de loi arrive au Congrès, appuyé par un film lancé sur Internet.
Quand, en France, les politiques, alertés par l'UFC-Que Choisir, s'effarent de la pollution intérieure de leurs domiciles, les Américains découvrent avec stupeur avec quoi ils se frottent, se shampouinent, se tartinent et se maquillent.
Ils réalisent que leurs bébés subissent un sort analogue dès leurs premiers débarbouillages. Pire : vu ce que la peau de leurs mères a absorbé avant leur naissance et pendant la gestation, les nourrissons naissent « pré-pollués », selon le film d'animation « The Story of Cosmetics », dévoilé fin juillet pour coïncider avec le dépôt du texte de loi. (Voir la vidéo en anglais)
J'adapte ici le contenu d'un article et d'une tribune parus récemment sur le sujet, l'une sur le Huffington Post, l'autre dans le bimestriel Emagazine, en intégrant ce que je connais par ailleurs de la réglementation américaine.
Annie Leonard, l'auteure du film, explique sa démarche :
« Comme la plupart des parents, j'essaie de garder ma famille en sécurité. Mais j'ai découvert que ma salle de bain était un véritable magasin de toxiques. Qu'est-ce qu'on est censé faire pour lutter contre ça ? »
Seulement huit ingrédients interdits en 70 ans
Bon courage ! L'Environmental Protection Agency (EPA, équivalent du ministère de l'Ecologie) a seulement interdit l'usage d'une poignée de composants chimiques depuis l'instauration du Toxic Substances Control Act, en 1976. Et ce, en dépit du fait que 80 000 substances sont aujourd'hui utilisées dans l'ensemble des produits de consommation.
Et, quand on entre dans le détail des seuls produits de soin personnel, on apprend que la loi fédérale réglementant ce secteur a été rédigée il y a 70 ans. Depuis, la FDA (Food and Drug Administration) a interdit seulement huit ingrédients parmi les 12 000 environ utilisés par cette industrie.
La FDA n'exige même pas qu'ils soient tous listés sur l'étiquette. L'industrie est censée s'autoréguler, ce qui fait bondir Annie Leonard :
« Les labels des flacons sont rassurants : “doux”, “pur”, “naturel”, “non-agressif”, “recommandé par les pédiatres”, “approuvé par les dermatologues”… Mais quand vous lisez les notices avec des loupes, ou que vous allez sur Internet pour des détails, c'est une autre histoire.
Laureth sulfate de sodium, urée de diazolidinyl, ceteareth-20, PEGs, quaternium-15… autant d'ingrédients qui contiennent des substances cancérigènes comme le formaldehyde ou la dioxyne 1,4. »
« L'Histoire des choses », un best-seller pédago et ludique
Avant de lancer sa propre croisade contre les produits de beauté farcis aux polluants, Annie Leonard était déjà connue pour avoir conçu en 2007 le petit film d'animation « The Story of Stuff », véritable phénomène sur Internet avec 12 millions de vues. Son livre éponyme, sorti en mars 2010, est toujours un best-seller.
Elle y décortiquait avec une pédagogie ludique et grinçante le fonctionnement politico-énonomico-industriel de la société de production-consommation. Elle a ensuite décliné le concept avec « L'Histoire de l'eau en bouteille », « L'Histoire de la Bourse du carbone », et on attend prochainement une « Histoire des appareils électroniques ».
Bref, découvrir des cancérigènes dans les shampoings pour bébé n'a pas du tout plu à Annie Leonard. Elle s'est renseignée auprès de scientifiques, qui n'ont pas cherché à la rassurer.
Crèmes solaires, rouges à lèvre, lotions pour le corps, gels de rasage, déodorants, parfums, etc. Tout cela contient des produits liés au cancer, mais aussi aux problèmes d'apprentissage, à l'asthme, à la qualité du sperme, aux difficultés de reproduction.
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